Le terme d’occupation
D’après Meyer (2013) pour la France, l'emploi et la définition du terme occupation sont directement issus du concept de la littérature anglophone, car « Les définitions ont d’abord été élaborées en anglais – puisque presque la totalité de la littérature en ergothérapie est rédigée dans cette langue » (Meyer, 2013, p. 3).
Meyer (2013) nous rapporte les définitions retenues sur l’occupation et activité en français concernant le projet terminologie de l’European Network of Occupational Therapy in Higher Education (ENOTHE). Il en ressort que l’occupation serait « un groupe d’activités, culturellement dénommé, qui a une valeur personnelle et socioculturelle et qui est le support de la participation à la société. Les occupations peuvent être classées en soins personnels, productivité ou loisir » (Meyer, 2013, p. 16) et que l’activité serait « une suite structurée d’actions ou de tâches qui concourt aux occupations » (Meyer, 2013, p. 14).
Le contexte d’épidémie de COVID-19, peut être considéré comme un événement traumatisant entrainant une maladie ou une altération de notre environnement. Cet événement va influencer nos capacités d’exercer diverses occupations/activités, qui constituent la structure de la vie quotidienne et s’avèrent fortement diminuées, amenant à des répercussions émotionnelles, limitant nos choix et nos opportunités. Cela peut « entraver l’exercice des rôles sociaux, dégrader le statut social, affecter l’identité sociale et personnelle, transformer par contrecoup l’environnement social et familial, restreindre la compréhension du monde, réduire l’accès à des ressources financières, détériorer la qualité de la vie » (Meyer, 2010).
Equilibre et déséquilibre occupationnel
Reed et Sanderson (cité par Meyer, 2013, p.18) donnent une définition de l’équilibre occupationnel : « Gérer [l’occupation] d'une manière qui soit satisfaisante sur le plan personnel [...] et qui répond aux exigences de son rôle [...]. Chaque personne a un schéma d'équilibre individuel qui convient à sa santé » (ma traduction). Cet équilibre occupationnel, touche à la santé physique et mentale influençant la vie d’une personne.
Dans certaines conditions, l’être humain se voit perturbé, limité dans ses occupations/activités quotidiennes. L’équilibre occupationnel de l’individu peut être perturbé soit intrinsèquement ou extrinsèquement, entrainant un déséquilibre occupationnel que Reed et Sanderson (cité par Meyer, 2013, p.18) définissent comme une « incapacité à gérer les occupations d'une manière qui soit satisfaisante pour la personne et qui répond aux exigences de son rôle, ce qui entraîne une détérioration de la santé et de la qualité de vie » (traduction personnelle).
Un déséquilibre occupationnel peut donc apparaitre pour les individus en lien avec le contexte de la covid-19, qui vient s’inscrire comme une perturbation extrinsèque nouvelle, une situation jamais rencontrée, donc sans références possibles de stratégies d’adaptations. Ce déséquilibre peut aboutir alors à une situation de privation occupationnelle.
La privation occupationnelle
Christiansen et Townsend, (cité par Meyer, 2013, p.18) définissent la privation occupationnelle comme « un état d'exclusion prolongée, de réalisation d'une occupation signifiante ou significative en raison de facteurs échappant au contrôle d'un individu, tels que l'isolement géographique, l'incarcération ou le handicap » (traduction personnelle).
Lorsqu’une privation aux origines variées, se met en place dans la vie quotidienne d’une personne et dans un temps durable, elle peut entrainer l’isolement de l’individu. Whiteford (1997) mettait en évidence dans son étude sur des prisonniers aux besoins particuliers (troubles mentaux), qu’ils ressentaient un ennui, amenant à une démotivation, car leur environnement n'offrait quasiment aucune possibilité occupationnelle.
Ce manque d'opportunités aux activités, est ce que nous nommons privation professionnelle (ou déprivation occupationnelle), apparaissant comme un facteur de « désorganisation psychique » (Riou & Le Roux, 2017). L’ennui peut avoir un impact sur la santé mentale, et comme le précise Fahlman et al. (2013), celui-ci est un sentiment amenant à un désengagement du monde car la personne est comme « coincée dans un présent apparemment sans fin et insatisfaisant » (traduction personnelle).
Nous remarquons que la privation occupationnelle ne permet pas de s’adonner à l’occupation, car elle s’oppose à nos besoins d’engagement et de participation, causés par « des facteurs personnels et environnementaux » (Riou & Le Roux, 2017), réduisant notre motivation et notre santé mentale globale (diminution de confiance et de l’estime en soi par exemple).
Face à cette privation, proposer aux patients la possibilité d'agir est crucial pour « l’image qu’il a de lui-même et des soins » (Riou & Le Roux, 2017). En choisissant des activités qui ont du sens, le patient retrouvera « le pouvoir de se définir » (Riou & Le Roux, 2017), et de montrer ses capacités. En effet, d’après Riou et Le Roux (2017), une fois que l’individu retrouve sa capacité d'agir sur son environnement, l'anxiété et les tensions relationnelles s’en retrouvent réduites. L'idée du concept de privation occupationnelle révèle ici les impacts potentiels d'un enfermement sans moyen de mener des activités, soulignant « l’intérêt d’une intervention précoce en ergothérapie » (Riou & Le Roux, 2017).
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