"Chacun sait ce qu’est une émotion, jusqu’à ce qu’on lui demande d’en donner une définition. A ce moment-là, il semble que plus personne ne sache."
(Fehr & Russell, 1984)
Actuellement la vague du "tout gestion" fait fureur et les émotions n'y échappent pas..Il est possible de surfer sur cette vague comportementale, à condition de ne pas en être dupe ..Le coaching, les thérapies de gestion des émotions proposent tour à tour de les vivre, les exprimer, les canaliser, mais en tout cas, il ne s'agit plus de les réprimer. De nombreuses théories se développent donc autour des émotions et des thérapies en sont issues. Freud, quand à lui, peut nous aider à nous poser la question la différence entre émotion et pulsion. L'émotion se situe plutôt du côté du comportement visible, tandis que la pulsion se situe du côté de l'inconscient. La pulsion se situe du côté de la poussée intérieure (pulsions, de vie, sexuelle et d'auto-conservation, pulsions de mort). L'émotion est du côté du ressenti, de l'éprouvé et du comportement potentiel. C'est un quelque chose de plus visible, de plus nommable et reconnaissable. Freud, théorise surtout sur l'angoisse et pour lui, l'émotion n'est qu'une catégorie un peu trop généraliste. Il s’intéresse à ce qui n'est pas visible, à ce qui relie le sujet à ses pulsions et à ses désirs.
Après une brève classification des émotions, nous verrons quelles sont les activités susceptibles de proposer un travail autour des émotions, en sachant que nous ne pourrons pas explorer toute la gamme des émotions humaines et que seules, les plus saillantes, seront explorées. Chaque patient, en fonction de son histoire et de ses difficultés aura à explorer, exprimer, canaliser, gérer certaines de ses émotions.
Émotions primaires et secondaires
De nombreuses classifications ont été tentées, tant du côté des philosophes, que des psychologues ou même des sociologues, coachs en entreprise, etc...Actuellement, 6 ou 7
familles d'émotions, dites universelles, sont répertoriées. Chaque famille d'émotions, comprenant des émotions proches mais avec des intensités différentes, correspondrait à une expression faciale particulière. On relève ainsi: la joie ou bonheur, la tristesse, la colère, le dégout, la peur, la surprise, le mépris. Il faut garder à l'esprit qu'il ne s'agit pas de se débarrasser d'une émotion mais de pouvoir utiliser cette piste des émotions comme un prétexte à parler de soi de façon plus facile que lors d'associations libres.
Ces émotions sont dites fondamentales ou primaires, au sens où elles sont les premières vécues et ressenties. Selon les auteurs, elles sont reconnues comme universelles, non dépendantes de la culture ou pas.
Les émotions secondaires sont l'aboutissement de l'apprentissage des émotions primaires, c'est à dire de l'élaboration par la pensée, de la conscientisation des réactions instinctives.Ce sont des émotions qui sont généralement engendrées par l'évocation de souvenirs et ces émotions sont matures une fois que l'on est adulte. L'inconscient, qui est tissé dans notre corps et nos souvenirs, prend probablement une place tout aussi importante qu'en ce qui concerne les émotions dites primaires, plus archaïques et instinctuelles. (pour approfondir voir classification des émotions)
Il est donc possible de proposer des jeux dits de "gestion" des émotions, qui, sous couvert d’un mot très illusoire de « gestion », (mais très parlant pour les patients), permettent surtout de pouvoir en parler, en jouer et les transformer de façon concrète (sac à colère, gribouillages et taches) ou de façon plus abstraite et verbale. Il peut être intéressant, par exemple du côté des jeux, d'aider les patients à établir leur propre liste et de pouvoir ensuite représenter/nommer les différentes émotions (voir dixit et émotions) ou de faire un travail collectif pour nommer les émotions et tenter de les organiser dans une sorte de méta-plan.
Des émotions
Tristesse
De ce coté là, les patients en psychiatrie attendent quelque chose de très précis: en être débarrassé, de préférence rapidement et avec des médicaments. La tristesse fait partie des symptômes des troubles de l'humeur. La tristesse n'est que très rarement vécue comme un élément positif ou comme un moment à traverser. Les patients évoque des images de trou noir, de tunnel, de gouffre, de noyade dans les larmes, d'envahissement par cette émotion. Lorsqu'elle est contenue dans des limites acceptables, au sens de réactionnelle à des événements, ou qu'elle reste dans une intensité supportable, la tristesse peut être considérée comme un passage nécessaire. Les larmes, parfois mêmes, sont décrites comme source de soulagement. La tristesse peut être considérée comme une émotion, si elle demeure limitée dans le temps, mais elle peut aussi se transformer en un sentiment, plus durable, plus diffus. Un sentiment qui peut alors durer très longtemps, s'installer et devenir insidieux, comme une toile de fond dans la façon d'être.
Il est donc possible de proposer un travail thérapeutique autour de cette émotion, surtout si elle devient un sentiment qui dure. Nous retrouvons là les thérapies centrées autour de l'état dépressif. Toutes les thérapies centrées sur les ressources, la conscience de sa propre existence et de sa valeur peuvent aider les personnes à retrouver un sentiment d'une vie valant la peine d'être vécue et dans laquelle la tristesse peut devenir une émotion intégrée et non plus unique. (voir Autour de la tristesse).
Colère Lorsque l'on se penche sur cette émotion, les termes de frustration, insatisfaction, injustice, manque de reconnaissance arrivent rapidement. La colère est souvent associée à une énergie forte et l'image du volcan est la plus fréquente. La violence, naturelle et présente en chacun de nous, peut s'y nicher, sachant que tout est une question de dosage et que cette énergie contenue dans la colère est nécessaire. Bergeret, dans son livre "La violence fondamentale" en parle comme d'une composante nécessaire à la vie, en termes d'affirmation de soi, de lutte pour la (sur)vie. Elle est souvent très présente, tournée contre soi ou l'autre. Cette énergie peut aussi se transformer en rage, avec cette fois des éléments d'agressivité, de destructivité contenues et risquant de déborder les capacités de la personne. Les déclencheurs de cette émotion peuvent être identifiés et (re)connus. L'origine en est souvent, bien plus obscure et l'intrication avec la pulsion de mort reste à interroger.
Il est possible de proposer des jeux dit de "gestion" prétexte à parler de soi à partir des émotions de façon générale, ou à partir de la colère en particulier. (voir Volcano ). D'autres formes de thérapie peuvent aider à décharger cette émotion (thérapie, par le cri, boxe, sport, toute activité physique) en se rappelant qu'une simple décharge ne suffira pas pour une élaboration psychique. Ce temps de décharge énergétique va soulager en termes de quantité d'énergie mais il faudra aussi utiliser des médiations actives (de type sculpture sur bois ou pierre, argile, etc..) qui pourront alors proposer un objet témoin de cette première transformation concrète de l'énergie. Et les temps de parole seront nécessaires pour donner une qualité thérapeutique à ce qui pourrait n'être autrement que décharge, soulagement dans l'agir. (voir élaboration psychique).
Peur
L'émotion de la peur, souvent liée à une situation, n'est pas aisée à travailler en thérapie. Il est important de ne pas confondre une peur, qui reste momentanée et nous permet d'avoir un réflexe de protection vis à vis d'éléments dangereux. C'est une réaction qui nous permet d'identifier le danger et de fuir une menace, ou de la combattre. c'est la réponse combat-fuite. Depuis la nuit des temps, indispensable à notre survie, elle nous informe des dangers, éveille notre attention pour que nous trouvions rapidement la réponse appropriée à une menace. C'est une réaction de nos cerveaux reptiliens et limbiques qui déclenchent des mécanismes neurophysiologiques et psychologiques sophistiqués. La peur, est un système d’alarme hautement perfectionné.
Cette émotion, souvent perçue comme plus ou moins négative et désagréable, nous fait aussi ressentir notre corps d'une façon plus intense, dans une sorte d'hypervigilance. Il suffit de considérer l'attrait que peuvent avoir les films effrayants pour les adultes ou les contes qui font peur pour les enfants, pour constater cela. Ces peurs contrôlées et imaginaires sont des scénarios qui peuvent aider enfants et même adultes, à vivre, intégrer, apprivoiser leurs peurs. Dans le contexte des jeux, la notion de peur demeure limitée, à moins d 'aller vers des jeux à risques, ce qui n'est guère pertinent dans le cadre d'une thérapie. Dans les TCC, des exercices d'immersion dans les peurs, phobies ou éléments angoissants peuvent être proposés, (sous hypnose ou dans la réalité), de façon à apprendre à les repousser, la canaliser, les gérer. Toutes les thérapies psycho-corporelles permettent aussi de faire baisser le niveau global de l'anxiété. Les exercices de respiration aident en cas d'angoisse.
Joie, bonheur, plaisir
Souvent compliqués à ressentir pour les patients...Ces émotions sont, bien sûr, à favoriser de toutes les manières possibles et les jeux en font largement partie. S'amuser, jouer, entrer dans une dimension de légèreté, au c½ur même d'une hospitalisation permet aux personnes de pouvoir éprouver à nouveau du plaisir. (Voir l'éprouvé).
Quelques questions
- Quel type d'émotions les jeux peuvent-ils proposer?
- Les jeu/activité/médiation permettent-ils d'exprimer les émotions, corporellement, verbalement ou de façon concrète?
- Quel est le potentiel d'expression? De canalisation? de sublimation? De transformation?
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