Le principe de réalité permet d'attendre et de mettre une limite, un frein, à la toute-puissance pulsionnelle. C'est la construction progressive du Moi qui se différencie progressivement du Ca. Il lui soutire de l’énergie libre (processus primaire) et la lie dans des représentations psychiques de plus en plus élaborées, grâce au système perception-conscience. Il soustrait progressivement de l'énergie au principe de plaisir, pour l'organiser, la lier dans des intentions, des buts, des projets. Les pulsions ont besoin d’être liées dans des processus dits secondaires, dans des élaborations psychiques, des compréhensions intellectuelles, des sublimations artistiques, pour être intégrées de façon non destructrice et vivables au quotidien. Or le moi, qui est l'instance susceptible de lier l'énergie pulsionnelle, demeure morcelé dans la psychose.
En plus des compromis nécessaires avec le ca et le surmoi, le moi doit tenir compte du monde extérieur. La réalité vient donc mettre en place ce que Freud nomme " le principe de réalité ". C’est cela qui mettra un frein aux processus archaïques basés sur l’illusion de toute-puissance. Les pulsions de destruction trouvent, elles aussi, une limite à leurs expressions chaotiques. La réalité vient poser des limites, des frustrations, mais aussi et surtout, canaliser et permettre à des personnes de vivre ensemble selon un consensus commun. Ce principe de réalité va se retrouver dans la confrontation au matériau concret, dans l’existence des différents cadres thérapeutiques, dans l’existence et le respect des autres personnes, dans le respect et la référence à la Loi. C'est donc aussi dans la construction du surmoi que ce principe de réalité va avoir un impact.
Le moi tient compte du principe de plaisir (régit par le çà principalement ) et du principe de réalité (régit par le surmoi essentiellement). Contribuer à restaurer ce principe de réalité, contribue à l'étayage d'un surmoi souvent mal intégré pour les personnes psychotiques et donc aussi à l'étayage du moi des sujets psychotiques. Divers moyens seront à notre disposition concernant la relation, le cadre et la médiation, pour renforcer ce principe de réalité. Pour permettre cette intégration du principe de réalité, la parole est fondamentale, en tant que fondatrice du sujet, qui parle et qui existe, marqué par la loi. La fonction parentale exercée là est liée au paternel.
"La loi, quel que soit le système de ses énoncés, dit au sujet: c'est là qu'il y a de l'interdit, sans quoi tu serais fou, tu ne pourrais pas parler". (Freud).
Le moi de la personne, constitué, permet alors, l’existence d’un espace intérieur différencié du dehors et d’autrui. Pour les personnes psychotiques, il est possible de se demander si cette étape sera jamais réellement et totalement acquise. Néanmoins, c’est vers cette tentative que peut tendre la thérapie de ces personnes.Le travail thérapeutique se fera donc essentiellement autour de l’intégration du processus de réalité.