La relation thérapeutique en technique psycho-corporelle est particulière. Tout d'abord, le ou la thérapeute, quel que soit son sexe, sera vécu dans un premier temps comme une sorte de bon parent qui prend soin de la personne, avec une nette consonance régressive et du côté du maternel. Les dimensions de la voix et du regard ont leur importance, ainsi que les capacités de contenance, de structuration et de symbolisation, autant de capacités que les personnes vont pouvoir intégrer ensuite en elles.
Régression et transfert maternelUne bonne mère, selon Winnicott, c'est une mère ou un entourage maternant qui a suffisamment porté et sécurisé l'enfant. Sur un plan de l'idéal fantasmatique, ce serait une "mère" qui donne, soutient, étaye lorsque cela est nécessaire à l'enfant, puis lui permet de se séparer d'elle. Toute cette attention maternelle, décrite comme le handling et le holding, devrait pouvoir être intégrée en soi pour devenir ensuite la capacité à prendre soin de soi. Ce fantasme de bonne mère peut devenir, l’un des supports d’identification de l’ergothérapeute, d’où la nécessité d’une interrogation approfondie, et toujours à refaire, des tendances maternelles et maternantes de la thérapeute. En effet, avoir le fantasme de réparer une mauvaise relation maternelle en étayant en permanence le ou la patiente n'est pas mauvais en soi, mais doit être analysé et travaillé pour ne pas maintenir le patient en état de dépendance.
L'atelier de relaxation, par tout son dispositif régressif, cocoonant et maternant, est la porte ouverte à des situations relationnelles de régression, de dépendance, d'enveloppements réparateurs et rassurants. Le contenant spatial de la salle, des couvertures, les contenants sonores de la voix et de la musique en sont les principaux acteurs. Toute l'atmosphère, l'ambiance, la qualité de relation thérapeutique contribuent à retrouver une dimension régressive, porteuse d'une enveloppe maternelle et maternise indéniable. Le phénomène de régression est donc indéniable. Nous touchons véritablement à "l'enfant intérieur" du patient, lui permettant ainsi de retrouver une image du corps parfois enfouie dans les strates du passé.
Il est donc nécessaire de bien distinguer la réalité de cette dimension et les fantasmes projetés, aussi bien par les patients(tes) que par les thérapeutes. Il est tout aussi important de garder cette notion présente à l'esprit afin d'utiliser cette donnée dans l'analyse d'une thérapie. En effet, le dispositif en lui-même peut déjà provoquer des réactions particulières du côté des patients: - Si cela rejoint des expériences antérieures positives, la relaxation est d'autant mieux vécue, à condition de ne pas maintenir la personne dans une situation de dépendance. Il est important que la personne puisse intérioriser cette figure extérieure mettant en œuvre le "prendre soin".
- Si cela rejoint des expériences précoces négatives, type traumatiques ou d'enveloppe maternelle insuffisante, déficiente, il est possible, alors, d'en espérer une réparation au moins partielle. L'illusion de tout réparer doit être abandonnée, mais il est tout de même possible d'offrir des vécus de sécurité, de confiance possible en soi et en l'autre, des temps de pause autorisés, des moments d'écoute de sa souffrance et de sa tristesse.
- Si la relaxation s'adresse à des personnes psychotiques en trop grande dissociation, il y a le risque de faire resurgir l'angoisse de morcellement et de les pousser à se réfugier dans le délire et les hallucinations. C'est l'une des raisons qui a conduit ergothérapeute à utiliser les techniques d'auto-massages, plus structurantes et permettant d'étayer le schéma corporel et de densifier la conscience du corps.
Pour certains patients, il est clair que cette dimension régressive, agréable, est recherchée, sans aucun désir d'aller plus loin, de se découvrir ou de devenir autonome. Ce n'est pas le but recherché, même si cette étape est, parfois, incontournable avant de pouvoir approfondir les processus thérapeutiques. Cela permet à la personne de renouer avec des dimensions enfantines, antérieures et de pouvoir gouter au plaisir de se laisser porter. Depuis que le mot d'hypno-relaxation est utilisé, la notion d'emprise de l'autre sur soi est plus souvent exprimée.
Le regard
Le regard est également une dimension importante dans cette thérapie. Le regard vient de l'extérieur et selon sa qualité, il peut être vécu comme un miroir permettant à la personne de se dire et d'être reconnue dans ce qu'elle est, ou il peut être mal vécu. Il est important de distinguer la qualité du regard porté par la thérapeute et le ressenti du patient.
Des fantasmes peuvent surgir, portant sur cette dimension du regard de l’autre sur soi. En effet, les diverses situations, assis ou allongé, face à face ou seul à côté des autres, permettent une alternance : Exister sous le regard des autres ou exister pour soi-même.
La thérapeute évite donc de porter un regard trop insistant sur les personnes et se situe plutôt comme cherchant, elle aussi, en elle-même, les sensations à écouter. Pour certains patients pour qui se sentir exister passe trop par le regard de l’autre, ce type de méthode permet l’expérimentation d’un espace personnel intime, intérieur, et non soumis au regard d’autrui. L’absence de confirmation de leur existence, de leur valeur, de leur intérêt, dans le regard d’un autre peut être angoissante pour ces personnes. Justement, la situation de relaxation peut, par son dispositif centré sur le sentiment de sécurité et de bien-être, permettre d’oser ressentir, vivre et peut-être dépasser une telle situation.
Les personnes hystériques sont un bon exemple du besoin du regard d'autrui pour se sentir exister et défini(e). Les personnes psychotiques ou état-limites peuvent quant à elles, s'appuyer sur le regard d'autrui, en chercher la présence comme pour rencontrer une limite à leur sentiment de confusion, de dilution, de chaos. A l'inverse, un regard trop insistant ou direct peut être vécu comme une intrusion dans leur espace intérieur, mal délimité. Là aussi, l'importance de la distinction dedans-dehors est fondamentale.
Le regard, lorsqu'il se pose sur les personnes ne doit pas se situer dans l'observation, mais permettre au patient de sentir la présence bienveillante de la thérapeute, accueillant, sans juger, leur façon de faire et d'être. L’expérimentation est personnelle et ne doit pas être dérangée par un regard qui, le plus souvent, gène le patient qui peut le ressentir comme jugement ou évaluation, observation. Il se sent alors, en devoir d’imiter, de bien faire ou parfois de ne rien faire, seul moyen de se sentir exister dans cette opposition. Les exercices n’ont pas à être réussis, puisqu’il ne s’agit pas tant de l’exercice en lui-même, que de la capacité du sujet à s’auto-gérer, qui est importante. Il est donc inutile de vérifier si l’exercice est bien fait. Le regard évaluateur ne peut s’inscrire dans de telles séances.
Le regard porté sur autrui va contribuer au renforcement narcissique de la personne, venant ainsi faire écho au regard de la mère qui permet à son enfant d'expérimenter, face au miroir, son sentiment d'existence, unique, différenciée, valable et individuée. La bienveillance du regard reste fondamentale.
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