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Espace collectif et espace personnel

Espace collectif et espace personnel Zoom sur Espace collectif et espace personnel


Dans la toute première version, deux espaces sont proposés pour le jeu de la maison: un plateau collectif et des mini-plateaux personnels. Une évolution s'est progressivement faite, par des questionnements successifs et des tests, entre espace personnel et espace collectif.

La proposition de mise en place d'éléments de décoration, ludiques et visuels, a également été tenté, dans l'espace collectif et/ou personnel.






Maison collective

Dans la première version du plateau de jeu, pour commencer la partie, les participants devaient se mettre d’accord sur le nom des 6 pièces dans lesquelles devait se dérouler le jeu. Cette mise en commun était censée permettre une première discussion entre les participants. Lors d’un premier test, nous n’avions fixé aucun critère de départ et nous nous sommes retrouvés avec une maison nantie d’un garage, d’une cave, de WC et sans cuisine, ni chambre…Les cartes étaient posées au centre du plateau. Nous avons donc ensuite proposé de souligner la nécessité des 4 pièces principales : cuisine, salon, chambre et salle de bain. Une fois cette base posée, il fallait ensuite parvenir à un accord sur les deux dernières pièces. Mais même ainsi, pour des patients psychotiques, cet accord était très complexe et long à obtenir, voire parfois même source de conflits. Nous avons même tenté de proposer des pièces ayant un double emploi, mais sur un plan symbolique, nous nous retrouvions dans des zones de flou et d’indistinction, ce qui n'était guère pertinent pour des patients psychotiques. Les éléments de décoration étaient posés sur le plateau collectif.

L'idée de départ était de proposer un espace de vie partagé, pour favoriser la coopération dans la création commune de cet espace. La difficulté principale était que, pour les patients psychotiques, cette dimension collective n'était pas toujours entendue dans une dimension imaginaire et cette idée d'un espace collectif posait problème, créant une confusion des espaces, un sentiment d'indistinction. Ainsi, l'un des patients, lors du test en individuel (voir séance en individuel) avait souligné son hésitation à se trouver dans la même pièce que la stagiaire ou l'ergothérapeute, comme si réalité potentielle et imaginaire se confondaient. Il a donc été nécessaire de renforcer les espaces personnels et de leur donner une place plus importante, permettant d'avoir son propre espace, bien distingué de celui des autres. (voir ci-dessous).


Le second plateau de jeu s’est inspiré de dessins de plan d’architecte, avec des éléments symboliques de portes ouvertes et d’escalier. Il est devenu plus petit, hexagonal et présente désormais un élément central : un escalier au centre d’un espace vide matérialisant un couloir. Une entrée est venue s’inscrire aussi comme un septième espace. Il est désormais possible de se déplacer d’une pièce à l’autre, s’il y a des portes dessinées, mais aussi de passer par l’espace central, symbolisant un couloir et donc une zone de passage. Certaines pièces ont donc pu retrouver une clôture symbolique, ce qui n’était pas possible dans le premier plateau. Ce plateau plus petit ne peut plus désormais accueillir les cartes qui sont posées à côté des pièces concernées. Il était également possible d’ajouter de petits rectangles pour symboliser les pièces plus intermédiaires telles que le garage ou le jardin, ou pour permettre d’ajouter des pièces lorsque les choix des patients le nécessitent. Le plateau plus petit, permettait aussi de poser tout autour les nouveaux espaces personnels.

L'un de ces essais proposait des portes ouvertes et un escalier permettant d’imaginer l’existence d’un étage potentiel. Un espace vide au centre permettait, de poser les cartes-questions. Dans un autre essai, cet espace vide central est devenu un couloir, donc une zone de passage. Une entrée est venue s’inscrire aussi comme un septième espace, faisant le lien entre l’intérieur et l’extérieur. Ce type de plateau n’a pas rencontré un très grand succès, la dimension de plan ne permettait pas aux patients de se projeter facilement dans un tel espace qui leur semblait « trop géométrique » et « vide ». La présence de l’escalier dessiné les renvoyait surtout à une confusion des niveaux et les pièces vierges dont ils devaient déterminer en groupe le nom, n’amenait pas un sentiment de stabilité.


Un troisième plateau de jeu a été proposé et créé par un stagiaire qui a réalisé son mémoire sur le jeu. (Voir mémoire Romain Picherit). Ce plateau représente une maison, vue de l'extérieur dont la façade offre des fenêtres qui portent le nom des différentes pièces. Ce plateau comporte donc 12 pièces. L'avantage est que ce plateau offre une représentation classique, de la maison. L'inconvénient est de renvoyer une image assez peu conforme aux lieux de vie des patients qui sont plutôt en appartement voir en foyer/lieu de vie. Ce plateau propose l'intervention plus importante du hasard, puisque les participants utilisent un dé à 12 faces pour se déplacer, permettant d’aboutir dans l’une des pièces de la maison, au risque, lors de certaines séances, de ne pas explorer certaines pièces. Ce plateau permet la distinction entre le dedans et le dehors, avec un jardin et un garage situé à l’extérieur du dessin de maison. Il est encore actuellement utilisé dans le service où il a été créé, venant s’inscrire comme une mémoire vivante de sa création artisanale.


Le quatrième et dernier plateau de jeu créé par Charlène Pichon, se présente comme un plateau de jeu plus classique, qui présente les différentes pièces sous la forme de logos, inscrits dans les cases. Le dernier plateau de jeu est devenu un plateau d’un type ludique plus classique, avec une spirale permettant d’aller au c½ur de la maison ou d’en sortir. Le choix d’entrer ou de sortir peut être une première étape de décision collective, pour amorcer un travail autour de la capacité à faire des choix ensemble. Les cases sont porteuses de symboles des différentes pièces et leur nombre est calculé en fonction de l’intérêt potentiel des pièces. (Il y a moins de cases cave ou garage, par exemple). Ce dernier jeu favoriser essentiellement le travail de discussion autour du "savoir habiter". Il est possible de le télécharger dans un site, créé pour cela: https://jeudelamaison.wixsite.com/lamaison


Selon les groupes et les besoins, il est donc possible d'utiliser l'un ou l'autre des plateaux. Il est tout à fait possible, au départ, de demander aux personnes si elles souhaitent jouer sur un plan, une représentation schématique des pièces ou une image extérieure de maison, chacun de ces plateaux renvoyant à des niveaux différents de la façon d'habiter chez soi. L'idée de choisir un plateau, de mettre en place ensemble des pièces par un choix commun demeure un plus pour proposer une réflexion et un travail sur le co-habiter sur un plan imaginaire.Une création collective du plateau, de façon artisanale, reste un moyen de constituer un premier temps de création d'une base commune et sécure.




Espace personnel

Dans la première version du jeu, les maisons personnelles étaient en bois et très petites. Elles recevaient les jetons de couleur au fur et à mesure des réponses aux questions, sans qu’il soit question d’une compétition. Le simple fait de répondre à la question permettait de recevoir le jeton. Mais cette solution s’est avérée trop abstraite pour les patients qui ne pouvaient pas se projeter dans un espace personnel porteurs de jetons de couleur, symbolisant un item précis dont ils ne se souvenaient pas la plupart du temps. Les éléments de décoration concrets leur parlaient beaucoup plus mais certains protestaient de devoir les mettre dans l’espace collectif. Une collègue ergothérapeute et un élève de l’école réalisant son mémoire sur l’intérêt de ce jeu en thérapie, ont contribué par leurs remarques, à la transformation de ces espaces personnels, pour les rendre plus visibles et plus distingués.

Dans les autres versions du jeu, ces espaces sont devenus de petites maisons avec un toit, pour leur donner une forme globale signifiante. Elles ont été réalisées en tissu, avec 6 pièces matérialisées par des coutures. Elles permettent à chaque personne, de choisir les pièces dans lesquelles il ou elle souhaite aller pour jouer. La première étape est donc devenue le fait de choisir la couleur et la texture de l’espace personnel, puis le nom des pièces, sous la forme de petits cartons à placer dans les 6 pièces. Il est à noter que les pièces matérialisées par les coutures, sont situées sur deux niveaux et que certaines sont plus grandes que d’autres. Il est possible alors, d’observer comment les patients répartissent le nom des pièces en fonction de leur taille et leur situation. Une fois cet espace personnel constitué, une discussion peut se faire autour du choix des pièces de chacun, discussion plus ou moins approfondie suivant le groupe de personnes.

L'idéal serait que chacun puisse créer son propre espace, pas seulement avec la décoration (objets, papier peint, etc...), mais en terme de base: un appartement, une maison ou autre. Le changement de taille et de matière de l'espace personnel (passage du bois au tissu) a amélioré, non seulement le sentiment de cocooning, de sécurité, mais aussi l'investissement possible de ce lieu. Un espace plus grand, permettant de déposer les éléments de décoration, améliore aussi la distinction des espaces collectifs et personnels. Toutefois, il est à remarquer que jouer avec les deux plateaux demeure difficile pour les patients. Passer d'un espace à un autre nécessite trop de concentration, disperse l'attention et ne permet pas de se recentrer. C'est l'une des raisons qui fait que le jeu est plus facile à utiliser dans ses deux versions, soit du côté des habiletés sociales ou soit du côté d'"Etre (chez)soi ".

Dans la dernière version du jeu, les espaces personnels n'ont pas été conservés, dans la mesure où le choix a été fait de proposer une version téléchargeable. Les espaces personnels nécessitent un travail de création plus artisanal que les thérapeutes intéressés sont libres de créer ou pas.




DéKo and CO

Dans la première version, des éléments de décoration venaient se poser dans cet espace collectif, au fur et à mesure du jeu et en fonction des choix des personnes. Ces éléments de décoration étaient de deux types : des éléments concrets et sensoriels ou des images représentatives. Là aussi, la création du jeu s’est révélée d’une grande importance. A la fin de la création du jeu, l’un des patients les plus actifs, ayant enfin pu tester le jeu dans son entier, avait alors demandé à l’ergothérapeute ce qu’ils allaient pouvoir faire maintenant…Il avait alors souligné que, finalement, ce qui lui avait été le plus plaisant à réaliser, était la création du jeu. Ce patient a mis en évidence l’intérêt de cette notion de c-ocréation, même si ce n’était pas le but initial.

Des échantillons de tissu, de papier peint ou de carrelage, afin de donner une possibilité d’entrer dans une dimension sensorielle concrète. Ces échantillons ont donc été choisis, découpés, préparés par les patients qui ont beaucoup apprécié ce temps. Des évocations autour des papiers peints de leur propre maison personnelle ou d’enfance ont émaillé cette étape. L’odeur des papiers a été quelque chose de très intense, comme provocatrice en termes de souvenirs. Les carrelages ont fait émerger des souvenirs de mosaïque pour certains et nous avons divagué dans la Rome ancienne. Les tissus ont évoqué les doudous, les vêtements, les enveloppes diverses, telles que les couvertures, les draps...Le toucher s’est révélé le canal sensoriel favori de certaines personnes.

La volonté de départ que le plus d’éléments possibles soient créés par les patients nous avait incité à trouver de nombreuses images, découpées dans des magazines, en fonction des formes de chaque élément. Lors de ce travail préparatoire, nous avions déjà, pu constater combien certains patients schizophrènes pouvaient se perdre dans une recherche d’images, oubliant rapidement ce qu’ils cherchaient, happés par la multitude d’images des magazines. Ces éléments de décoration visaient à donner une âme à cette maison, mais cette proposition a rapidement démontré ses limites : trop d’éléments disparates et de formes très variées, finissaient par donner une sensation de quelque chose de brouillon, ce qui n’aidait pas ces patients déjà fort dissociés et dispersés pour la plupart. Les éléments sont devenus des petites cartes, donnant un sentiment plus acceptable pour les patients.

Plusieurs tentatives d’intégration de ces éléments concrets ou des images de décoration ont été faites. L’une d’entre elles consistait à choisir et poser un élément lorsqu’une carte déKo était tirée, mais cela ne résolvait pas un autre problème qui était apparu. Les patients psychotiques, en effet, avaient beaucoup de mal à accepter les propositions des autres personnes dans la décoration de la maison commune. L'utilisation des maisons individuelles, posées à côté du plateau collectif et permettant de recevoir les éléments choisis par chacun et chacune a été la méthode la plus pertinente pour intégrer ces éléments de décoration. Il est également possible de proposer un tout autre plateau, uniquement consacré à la mise ne place d'éléments de décoration, créant ainsi encore une autre possibilité de jeu.





Ce jeu a été créé de façon collective en 2016, sur une idée de Muriel Launois
puis re-travaillé encore et encore avec Romain Picherit et Charlène Pichon
Vous pouvez vous en inspirer ou même le télécharger







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