Pour la préparation d'un article paru en 2018 dans la revue ergothérapie, j'ai été amenée à approfondir mes connaissances des modèles conceptuels actuels en ergothérapie et donc ma tentative permanente de comprendre comment tous ses modèles pouvaient se tisser ensemble, dans un souci de clarification et de transmission aux élèves, mais aussi dans une tentative de faire des liens entre les domaines de pratiques parfois très différents pour les ergothérapeutes.
Toujours ancrée dans la transitionnalité et ses trois espaces, interne, intermédiaire et externe, mais avec un souci de plus en plus important de relier cette vision avec celle des modèles conceptuels en ergothérapie, je m'appuie sur ce qui est pour moi, une structure à penser. C'est à dire une structure d'organisation suffisamment vaste et large, pour permettre d'intégrer des éléments venus d'horizons différents, tant du côté des modèles inter-disciplinaires que des modèles en ergothérapie. Pour une ergothérapie holistique, prenant en compte l'ensemble des différentes facettes de la personne et dans une vision intégrative de différents modèles.
Le schéma suivant, proposé dans l'article, permet de situer le sujet au c½ur de la situation thérapeutique, entouré du cercle de l'activité, lui-même inclus dans le cercle de l'environnement. Ce schéma est très proche de celui du MCREO (voir site enseignement au Canada) et rejoint aussi le triptyque proposé dans le MOH. Cette structure en trois cercles, très simple, semble donc s'inscrire de plus en plus dans nos visions de l'ergothérapie. Cette simplicité peut permettre à chacun d'y intégrer ce qui fait sens pour lui ou pour elle. Je vous propose donc le fruit de mes cogitations personnelles autour de ma pratique en psy, venant colorer d’une façon particulière, ce schéma.
Le sujet
Le sujet est au c½ur de cette situation, sujet au sens de toutes ses facettes psychiques, cognitives, comportementales, conscientes, inconscientes. Le modèle bio-médical intégrait le sujet au sens de ses symptômes ou de son handicap, au c½ur d'un dispositif où le thérapeute était en position haute et où il devait débarrasser la personne de ses symptômes. le modèle bio-psycho-social permet lui, de situer le sujet dans ses trois dimensions: biologique (corporelle, somatique) psychologique (psycho-affective, cognitive) et sociale (environnementale au sens matériel et humain) et le thérapeute tente de faire émerger les solutions et les ressources venant avant tout de la personne.
Dans ce domaine du sujet, les ergothérapeutes travaillant en psychiatrie, vont pouvoir se tourner vers les modèles inter-disciplinaires de la psychologie et des psychothérapies qui en découlent. Le modèle psycho-dynamique permet d'intégrer la dimension psycho-affective de la personne, enracinée dans son histoire et son fonctionnement intra-psychique, prenant en compte l'inconscient, grâce aux théories de Freud qui nous aident à comprendre le travail de l'élaboration psychique. Le modèle cognitivo-comportemental permet de travailler au niveau des comportements dysfonctionnels qui font souffrir la personne et proposent un regard tourné vers les solutions pragmatiques et stratégiques. Nous sommes dans ces deux cas, dans le niveau du soin psychique, visant à un changement intra-psychique ou de comportement.
Du côté des modèles en ergothérapie, l'intégration de cette dimension du sujet propose plusieurs visions possibles, mais avec une notion commune, qui est celle du patient au centre du soin. Le modèle du MCREO propose, à ce niveau du sujet, d'intégrer les dimensions affective, cognitive, physique ET spirituelle, ce qui n'est pas le cas dans notre culture, car nous conservons souvent, du moins en psy, un regard un peu méfiant vis à vis de cette spiritualité dont nous ne savons pas toujours quoi faire, avec des glissement entre foi, croyances et mysticisme. Le modèle de Kawa, avec sa métaphore de la rivière comme symbole de la vie et de ses différents moments, permet à la personne de pratiquer une introspection et un retour sur sa vie, avec ses forces et ses faiblesses, mettant le sujet et son histoire au c½ur même de la thérapie. Le modèle du MOH va s'intéresser au sujet dans un domaine particulier: celui de son profil occupationnel.
L'activité/médiation/occupation
Dans ce cercle de l'activité, il convient déjà de déterminer la définition de l'activité sur laquelle nous nous appuyons, selon nos orientations personnelles, institutionnelles, culturelles: occupation(s) humaine(s), domaines d'interventions des ergothérapeutes, activités thérapeutiques, médiations expressives, occupations humaines. A ce niveau, nous allons pouvoir nous référer aussi aux modèles inter-disciplinaires et aux modèles de l'activité, développés par des ergothérapeutes.
Globalement, nous devrons donc déterminer si nous nous situons dans une intention de proposer:
- Du soin psychique pour lequel ce sont plutôt les modèles inter-disciplinaires de psy qui nous serons le plus utiles , qu'ils soient psycho-dynamique ou TCC ("traduction" de la rééducation, côté psy)
- Une réhabilitation pour laquelle les modèles de l'occupation humaine proposent des visions intéressantes ("traduction" de la réadaptation, côté psy)
Ce cercle de l'activité s'inscrit dans l'espace intermédiaire. Issu du modèle psycho-dynamique, c'est la théorie de Winnicott et de son espace transitionnel qui va nous donner des pistes de compréhension, qui peuvent donner du sens à des interventions d'ergothérapie, tant dans le domaine psy que somatique. les théories de R.Roussillon autour des concepts de médium et thérapeute malléable, peuvent aussi permettre de comprendre ce qui se joue lors de l'utilisation d'une médiation expressive. Il s'agit là d'utiliser une médiation créative, projective, ludique, dans une intention d'expression, domaine plus spécifiquement utilisé par des ergothérapeutes travaillant en psy. Les TCC quand à elles, ont tendance à proposer des activités plutôt au sens d'exercices à faire chez soi entre chaque séance.
Du côté des modèles en ergothérapie, ce sont les modèles de l'activité humaine qui vont pouvoir donner du sens à ce qui se passe dans une activité thérapeutique, qu'elle soit à visée cognitive, artisanale ou de vie quotidienne. C'est dans ce cercle de l'activité que nous trouvons, dans le modèle du MCREO, les domaines d'activités classiquement décrits en ergothérapie (soins personnels, productivité et loisirs). Ces modèles vont nous donner des pistes de travail autour de la motivation, l'engagement, dans le domaine de la conscience et de la volonté. Les intentions dans ce domaine, conduisent à aider la personne à être la plus autonome possible dans des activités qui donnent un sens à sa vie. La ré-adaptation, souvent nommée ré-habilitation en psy, se situe à ce niveau et ouvre sur le niveau de l'environnement et du cercle extérieur. Et nous passons là aux termes d'occupations humaines...
L'environnement
L'espace extérieur de la personne, le monde externe porte, le plus souvent, le nom d'environnement. Cette notion d'environnement extérieur recouvre les deux aspects de l'environnement matériel et humain.Dans le cadre des thérapies, il va donc s'agir du cadre thérapeutique et de la relation thérapeutique, individuelle ou groupale. Dans le cadre écologique de la personne, il va s'agir de sa famille, amis et collègues, de son habitat, lieu de loisirs ou de travail.
Du côté des modèles inter-disciplinaires, c'est la psychanalyse qui nous donne des pistes de réflexion sur la façon de poser un cadre thérapeutique, avec ses fonctions et ses modalités, cadre dont nous pouvons nous inspirer en ergothérapie dès lors que nous voulons proposer des médiations expressives. Nous pouvons aussi trouver des pistes de travail dans les thérapies systémiques, qui se proposent d'analyser les processus de communication et de relation dans les groupes (familiaux, amicaux, thérapeutiques). Du côté des TCC, l'accent est plus mis sur les protocoles que sur la notion de cadre thérapeutique.Il est également possible d'aller voir du côté de la psychologie sociale, communautaire ou des processus de participation sociale (empowerment).
Du côté des modèles en ergothérapie, cette notion d’environnement matériel et humain s'inscrit dans toutes nos interventions, qu'elles se déroulent dans un milieu artificiel ou écologique. Cette partie de notre travail s'inscrit alors davantage dans une intention d'une amélioration de la qualité de vie ou d'intégration sociale, donc clairement au niveau de la ré-habilitation.
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