Objectifs des patients
La priorité doit toujours être donnée aux objectifs des patients. Cela nécessite un accueil de la personne pour déjà entendre, non pas ses problèmes ou sa pathologie, mais pour entendre sa parole, son projet de vie, son intention principale, ses désirs. Seulement ensuite, nous pourrons proposer des pistes de travail et négocier des objectifs intermédiaires permettant d'aller vers le projet de vie de la personne. Il est important de ne pas considérer ce qui lui arrive comme un problème que nous devrions nous résoudre (à sa place) mais comme une occasion de changement possible, d'évolution et d'intégration de ses difficultés. Pour chaque personne il faut donc envisager un projet unique. Lors d'un enseignement toutefois, nous sommes obligés de réfléchir dans des termes plus généraux et globaux, et en termes de pathologie, sans perdre de vue que cela reste artificiel. Cette vision globale des objectifs demande à être modulée en ce qui concerne la psychose.
Les objectifs des patients psychotiques nous sont, le plus souvent, assez énigmatiques. La construction psychique de la réalité, pour ces personnes, n'est pas la même que pour nous. Le délire n'étant pas toujours conscient, le désir de guérir a des difficultés à être présent et opérant. Plus le déni est important , plus le soin sera difficile. En effet, n'ayant pas ou peu de conscience d'être malade, la personne n'aura que peu de demande d'aide et de soins. Au contraire, les thérapeutes sont souvent vécus comme persécuteurs, mauvais objets, empoisonneurs potentiels et empêcheurs de délirer "tranquille". L'alliance thérapeutique sera difficile mais prioritaire à obtenir.
Le besoin est plus de l'ordre de la pulsion. Il demande, généralement, à être satisfait le plus rapidement possible. La demande apparente de la personne est, souvent, de combler ses besoins à court terme. Les passages à l'acte sont toujours possibles, car ces personnes vivent dans l'immédiateté et la toute-puissance. Les processus primaires sont donc prédominants et l'énergie psychique insuffisamment liée. Il est important de savoir comment la personne se considère, ressent sa pathologie et si sa schizophrénie lui a été exprimée ou pas.Actuellement, il est dans l'air du temps d'expliquer et de définir la maladie à la personne et à sa famille, pour obtenir une bonne alliance thérapeutique. il existe d'ailleurs, des programmes (alliance, insigth) qui vont dans ce sens. Il reste à se demander si c'est la place d'un ou d'une ergothérapeute, dans la mesure où il s'agit d'un travail sur le symptôme, souvent associé à l'intention de favoriser une prise de traitement adaptée, et qui pourrait plutôt être proposé plutôt par des infirmiers, pharmaciens, médecins en co-animation. Dans tous les cas, il est important de connaitre l'explication que la personne elle-même donne de ce qui lui arrive, car c'est elle la mieux placer pour nous parler de son ressenti autour de sa souffrance psychique, ce qui est différent d'une vison extérieure, souvent clinique et centrée sur l'identification des symptômes pathologiques.
Principes thérapeutiques institutionnels
Action sur les symptômes
Ce sont essentiellement les médicaments qui peuvent permettre une action sur les processus pathologiques (Délire, dissociation psychique, hallucinations, etc…). Les médicaments sont les neuroleptiques (clopixol, haldol, fluanxol, largactil, loxapac, méléril, modecat, moditen, nozinan, piportal, risperdal, solian, tercian, zyprexa).
L'hospitalisation se fait parfois sous contrainte (HDT ou HO). L'alliance thérapeutique dépend de la reconnaissance ou du déni des symptômes apparents et gênants la vie sociale.
Action à long terme
C'est un travail long car il n'est pas question de guérison. Les rechutes sont plus ou moins fréquentes et selon la qualité du lien établi, la thérapie en sera facilitée ou non. Il est important de concevoir ce travail comme un travail à long terme et favorisant un maximum de liens avec un maximum d'intervenants thérapeutiques.
Il est fondamental de proposer des expériences les plus diverses possibles dans des cadres thérapeutiques différents, où pourra s'instaurer progressivement une relation thérapeutique médiatisée. Ces situations seront les plus variées possibles : sociales, thérapeutiques, individuelles, groupales, etc…. Mais à la dissociation psychotique doit répondre une cohérence thérapeutique, une réflexion commune, un échange verbal intense et une mise en liens importante, pour comprendre, analyser, mettre en mots.
Chaque thérapeute avec ses spécificités interviendra à son niveau pour
- Permettre de retrouver un sentiment d'une existence différenciée
- Retrouver des capacités cognitives, psycho-affective et relationnelles plus adaptées
- L'amélioration de la qualité de vie quotidienne et le retour à domicile seront les objectifs les plus à long terme et les plus fondamentaux.
Objectifs en ergothérapie
Les objectifs spécifiques en ergothérapie s'organisent autour de deux grandes lignes: le soin psychique, incluant un travail soit plus sur le comportement visible soit plus autour du fonctionnement intra-psychique et la réhabilitation; incluant la qualité de vie de la personne, son autonomie et ses habiletés sociales.
Soin psychique
Sous l'angle cognitivo comportemental
- Travail des capacités cognitives : mémoire, concentration, développer des stratégies d'organisation, accentuer la dimension de l'explication comme mise en liens de causalité (logique)
- Apprentissages de techniques nouvelles pour développer des capacités d'adaptation à diverses situations, transfert d’acquis dans des situations écologiques par répétition et expérimentations concrètes
- Découverte et apprentissage d'activités nouvelles
- Travail sur une meilleure conscience des comportements plus adaptatifs
Types d'ateliers: ateliers de remédiations cognitives, jeux, atelier d'apprentissage divers ou d'éducation thérapeutique, toute thérapie à visée de gestion des émotions ou proposant des protocoles, exercices ou consignes en vue de changement de comportement.
Sous l'angle psycho affectif
- Dimension de la distinction du moi et du non moi (Winnicott)
- Action pour se réparer et se sentir exister
- Dimension d'intégration du principe de réalité
- Permanence de l'objet et le sentiment de continuité
- Maintenance et contenance du psychisme (Anzieu)
- Processus intra-psychique
- Étayer la fonction contenante
- Soutenir la fonction structurante
- Expression et élaboration des pulsions
Type d'ateliers: Ateliers contenants d'expression et de création, avec des matières donnant un sentiment de permanence, de solidité, de lien. Il s'agit plus d'une attitude thérapeutique que d'un atelier précis.
Sous l'angle de l'amélioration de la qualité de vie et de l'autonomie
- Autonomie dans les activités de la vie quotidienne (cuisine, courses, hygiène de vie, etc...)
- Entrainement pré-professionnel, accompagnements pour favoriser la reprise d'activités productives ou citoyennes
- Détente, plaisir, occupation (pour une intégration possible dans des loisirs personnels ou intégrés dans des lieux de la cité)
Type d'atelier: Activités de la vie quotidienne, bilan eladeb , bilans d'autonomie, entrainements et apprentissages, en milieu artificiel et écologique, accompagnements à l'extérieur pour des entrainements des capacités d'intégration et de déplacement dans le milieu écologique, etc...
Sous l'angle des habiletés sociales
- Espace personnel : être en groupe sans se confondre à autrui, avoir conscience de son espace personnel et le conserver en situation de groupe
- Socialisation : Améliorer les capacités d'intégration dans un projet de groupe, expérimenter des capacités sociales et des compétences relationnelles en situation pratiques (ex : Groupe compétence)
- Intégration dans la cité (CATTP, CMP, associations, etc…)
- Participation au projet professionnel ou à l'orientation (CATTP, long terme)
Type d'ateliers: Les activités sociales, sportives, de club, d'association, etc...Elles peuvent être intégrées dans le lieu d’hospitalisation, de hôpitaux de jour, dans des CATTP (centres d’accueil thérapeutiques à temps partiel), ou des lieux plus insérés dans le réseau culturel d’une ville.